L'AZU 1955 de Thierry C.
Bonjour, voici en images, la restauration d'une 2CV Fourgonnette AZU de 1955.
Je cherchais à restaurer depuis presque 10ans une 2CV fourgonnette impérativement ( AU ou AZU de préférence). On voit beaucoup de berlines sur les rassemblements mais trop peu d'utilitaires !!. J'ai fini par trouver cette 2CV AZU dans la Vienne (86) où elle a passé toute sa carrière. Lorsque j'ai vu cette AZU pour la première fois, elle avait les phares qui regardaient le sol, pas de siège, son moteur posé à coté d'elle, alors qu'un moteur d'origine inconnu avait été jeté sous le capot sans même prendre soin de le fixer au châssis. Après inventaire, le constat etait sans appel, aucun élément de carrosserie n'est intact, 3 jantes sur 5 sont percées, il n'y a plus de pédalier, bref autant de signes qui auraient dû me faire fuir.... mais non, la voici à la maison !!!
Elle a très mal vieilli comme l'immense majorité des utilitaires de ces années. Elle a reçu, en plus de sa couche de gris initiale, 5 couches de peinture passées "au rouleau" avec de moins en moins de soins, couche après couche.... Lors du début de la restauration, on découvre qu'elle a été badigeonnée de vert clair, vert foncé, noir, bleu foncé pour arriver jusqu'à aujourd'hui dans cette "magnifique" livrée bleu ciel !
Dès les premiers éléments démontés, ça se confirme !! il va y avoir du boulot. Quand ce n'est pas la visserie qui coupe à l'approche de la clé, c'est l'écrou prisonnier qui tourne dans le vide, j'adore.... Pour le tri des pièces à conserver ou à recycler rien de plus simple il n'y a quasiment rien à sauver !!
La seule bonne nouvelle c'est que le vendeur ne m'a pas menti : "le châssis est super sain. Il n'est ni pourri ni plié" m'avait-il assuré. En effet il est souillé par de la terre séchée et recouvert d'une belle couche de gras sur l'avant mais rien de plus normal pour une 2CV de 60ans.
Après lui avoir retiré ses suspensions et ses trains roulants, passage au sablage puis le traitement à l'apprêt phosphatant. Les 2 meilleures jantes ainsi que 3 jantes supplémentaires achetées sur une bourse d'échange profitent du voyage.
Le moteur, d'origine bien entendu, a retrouvé sa vigueur et son éclat, merci Jean-Paul ! Il va reprendre sa place sur le châssis équipé de ses trains roulants et suspensions entièrement restaurés. Les pots de suspensions ont été décapés puis repeints avant de recevoir de nouveaux soufflets caoutchouc et de nouveaux couteaux. Les roulements des bras de suspension sont remplacés et montés avec une généreuse dose de graisse.
C'est maintenant à moi de jouer il va falloir user et abuser des tas, du marteau dans un premier temps puis vient l'entrée en piste du mastic et de sa copine la cale à poncer.. le tablier, les contre-joues d'ailes, le toit, les bas de caisse et la partie basse du coté chauffeur sont mis en apprêt...
La première grande phase étant terminée, il faut attaquer le gros du travail : LA CARROSSERIE. Avant l'indispensable "épreuve" du sablage, il vaut mieux dépointer les panneaux de carrosserie qui ne peuvent pas être sauvés.
C'est le départ vers l'atelier soudure.
La maigre carcasse restante va donc affronter la puissance du jet de sable. "Il ne va pas rester grand chose". C'est avec cette phrase que m'a accueilli le carrossier qui allait procéder au décapage tant la caisse avait du mal !!
Après des heures et des heures passées à découper, souder, meuler, un montage à blanc s'impose pour valider les travaux de tôlerie effectués .
Bonne nouvelle, tout s'assemble à merveille !! Merci GUILLAUME.
La partie inférieure ne doit pas être négligée : après avoir vidé 4 cartouches de joint d'entre-tôles pour prévenir des infiltrations d'eau et recouvert de phosphatant je traite l'intérieur des ailes arrières, les planchers avants et le dessous du caisson à l'anti-gravillon. Pour la finition, le peintre appliquera une couche de peinture de la même couleur que la caisse.
Les parties qui ne se verront pas ne sont pas oubliées pour autant, une couche de peinture de la couleur finale recouvre l'apprêt sous les passages de roues, les planchers, le compartiment du réservoir et l'emplacement de la roue de secours. Pour ces surfaces j'opère moi-même la colorisation, j'évite ainsi au peintre d'avoir à retourner la caisse dans la cabine. L'intérieur du caisson est désormais revêtu de sa couleur beige conforme à l'origine. Le plancher et les côtés du caisson sont habillés d'une feuille de contre-plaqué.
Ca y est, la caisse est chez le peintre. Je lui ai précisé que je n'étais pas à une semaine près pour la récupérer........ Cette phrase, nous verrons plus loin qu'après coup je n'aurai pas dû la dire!!! Je m'affaire donc pendant ce temps aux autres pièces de la carrosserie. Tout d'abord le capot. La photo ci-dessous parle d'elle-même, il a subi de nombreux outrages et encore, il y a déjà eu de nombreuses interventions de mon binôme préféré le tas et le marteau! Lors de son passage dans l'atelier "soudure" Guillaume a pris soin de souder 2 renforts au niveau du passage de la barre des phares. Ce point est critique sur cette génération de capot
Les prochains éléments à être restaurés sont les 2 ailes (avant bien entendu!). Pour ces 2 pièces, il est inutile de chercher à sauver les ailes d'origines. Je dois me rendre à l'évidence, il n'y a plus rien à en faire........... Fort heureusement, il est très facile de trouver 2 ailes de 2CV en bon état et pour un prix tout à fait raisonnable. Seulement voilà pour quelqu'un qui, comme moi avant d'être confronté au problème, ne s'était pas penché sur le sujet, une aile de 2CV c'est une aile de 2CV!! Hélas non! Il existe de très nombreuses variantes en fonction des années et des finitions. Il faut en trouver avec l'intérieur de l'aile qui soit plat et qui ne soit pas, à l'extérieur,percé d'un trou pour le clignotant!! Je trouve malgré tout 2 belles pièces que je m'empresse d'acheter bien qu'elles n'aient pas les joues intérieures conformes. Je dépointe les joues des ailes d'origines, seules parties des ailes d'origines qui soient récupérables,
ainsi que sur les "nouvelles ailes" et procède à la greffe de la joue conforme sur la future aile. Là encore c'est au "docteur Guillaume" d'opérer avec une soudeuse par point tel que d'origine.
C'est là qu'on se rend compte qu'il en faut du matériel pour restaurer un véhicule.
Les ailes sont passées à l'apprêt et poncées en vue de les peindre. Toujours pas de nouvelle de la caisse!?! Je porte malgré tout le capot et les 2 ailes au peintre : j'ai beaucoup de travail mais je m'occupe de vous dès la semaine prochaine........ J'attaque donc les portières. Sur ce modèle de 1955 ce sont des portes dites "suicide" c'est à dire que les charnières sont à l'arrière des ouvrants. Seules les Deuch jusqu'en 1964 étaient équipées de ce type de portes. Pour les modèles postérieurs les portières ont adopté le sens que l'on connait sur nos voitures dites modernes. L'état général constaté lors du démontage m'avait conduit à ne pas les faire sabler. Je comptais en trouver 2 autres sur une des nombreuses bourses que nous avons arpentées durant cette restauration mais force est de constater que ce sont des éléments quasi introuvables!! Celles qui sont proposées à la vente sont hors de prix (plusieurs centaines d'euros quelque fois!!) ou alors en plus mauvais état que les miennes quand ce n'est pas les deux à la fois!! Etonnamment, il n'en existe pas de re-fabrication donc inutile d'en chercher sur les sites marchands et même mes recherches sur le web n'ont rien donné. Je me décide donc à les sauver. Après un décapage complet et un passage dans les mains expertes de Guillaume mon "soudeur" préféré je redresse ce qui peut l'être et je passe au mastic. Ce sont les seules parties de cette carrosserie qui ne soient pas en tôle ondulée!! C'est presque plaisant de poncer ces éléments!!! Je dis bien "presque"!
Le ponçage au papier "500 à l'eau" me confirme que le résultat est à la hauteur de ce que je souhaite. Je charge donc les 2 portières et direction l'atelier de peinture. Et là une surprise m'attendait!! "Je vous ai peint le capot et les ailes!!" me dit Mathieu, le peintre. Ce n'est pas vraiment l'élément que je m'attendais à trouver recouvert de la robe définitive mais bon il faut bien commencer par quelque chose. Et la caisse? "Je n'ai pas attaqué mais c'est pour très bientôt..........." Me voici de retour avec 3 énormes pièces de tôlerie fraichement repeintes. Pour celui qui n'a pas rencontrer le problème ça semble être une bonne nouvelle sauf que, avoir à stocker plusieurs pièces de carrosserie abimées, juste décapées ou même en apprêt est une chose (on peut les empiler ou les faire tomber, de toute façon elles sont à refaire)mais une ou plusieurs pièces sortant de la cabine de peinture en est une autre!!!!! On ne sait pas comment les manipuler comment les stocker et surtout tout ça sans les choquer ou poser quoi que ce soit à proximité de peur que ça ne tombe dessus! Si j'avais récupérer la caisse en premier comme prévu initialement j'aurai remonté les éléments au fur et à mesure tel que ça doit être fait!!!!
Après avoir lourdement insisté pendant quelque semaines, que dis-je quelques mois, je retrouve mon carrosse dans sa couleur d'origine. Je suis obligé d'admettre que, s'il ne peint pas vite, il peint très très bien!! Le résultat est extra, la couleur est profonde, pas de "peau d'orange", pas de coulures bref du superbe travail. Merci Mathieu.
Le retour de la caisse sur son châssis est une étape importante dans la restauration d'une voiture ancienne,. C'est toujours une grande fierté et une réelle joie que de revoir cet ensemble tel que le constructeur l'a conçu. Et quelques tours de clé plus tard, c'est fait! Cette 2CV retrouve ses 4 roues, on peut désormais appeler ça une automobile
Sans attendre on se jette sur l'étape suivante : le remontage. Vous aurez remarqué que la rampe de phare est déjà de retour à sa place.
En effet avec la caisse j'ai récupérer tous ces petits éléments qui constituent une auto et qui sur cette 2CV sont peint couleur carrosserie, les phares, les éléments de tableau de bord, les cerclages de feux arrières, la trappe de ventilation, les tubulures de sièges, etc.... jusqu'au bouchon de réservoir !
Ensuite tout s'enchaine assez vite, en effet le remontage est aussi aisé que le fût le démontage à ceci près que la crainte de rayer ou abimer la peinture ne nous quitte pas ce qui était le dernier de mes soucis lors du démontage!!
Je continue en remontant la commande de la boite à vitesses, les pédales d'embrayage et de frein ainsi que la canne de frein à main. J'attaque ensuite une étape importante pour pouvoir redonner vie à cette fourgonnette, le faisceau électrique.
J'espère ne choquer personne mais cette AZU de 55 sera en 12volts! Cependant pour rester au plus proche de l'origine pas question d'installer un alternateur. J'ai donc fait re-bobiner la dynamo d'origine par un spécialiste dans le sud de la France pour qu'elle produise du 12V. Seules les inscriptions sur la bobine et sur la batterie trahissent cette modification. J'ai fais également le choix de la modernité pour les ampoules: des LEDs partout!! mis à par les ampoules des phares qui n'ont pas d'équivalent et sont donc à filament traditionnel et globe en verre jaune. Je recréé intégralement le faisceau en conservant les passages d'origines.
J'ai choisi, bien qu'elle ait été repeinte, de refaire au pochoir, tel qu'à l'origine, les inscriptions qui étaient sur le tablier permettant de dater la voiture.
On peut decripter ce "M10J5P" par: -M signifie MERVILLE c'était la marque de la peinture utilisée à l'époque -10 c'est le jour. -J est la dizième lettre de l'alphabet et indique le mois:Le dizième mois c'est Octobre. -5 correspond au chiffre des unités des années 50 donc 195"5" -P signifie qu'elle sort des usines PANHARD ET LEVASSOR Ce marquage nous apprend que cette voiture a été peinte avec de la peinture MERVILLE et qu'elle est sortie des chaines de l'usine Panhard le 10 octobre 1955!
Pour la suite, le remontage du capot, des ailes, de son pare-brise, du pare-chocs et de sa plaque minéralogique et elle commence à ce qui peut être considéré comme une voiture.... Les utilitaires, à l'époque devaient porter le nom de leur département d'origine sur une couleur de fond spécifique en fonction des produits transportés et des distances qu'ils étaient autorisés à parcourir. J'ai choisi de reproduire ce marquage bien que à cause des multiples couches de peintures dont a bénéficié cette utilitaire, je n'ai pas de trace ni de la dimension ni de la couleur d'origine...
Sur cette vue de l'arrière, on voit l'éclaireur de plaque au centre de celle-ci. Il devrait être rouge transparent mais là encore ce modèle ne se trouve presque plus, j'ai donc opté pour l'instant pour un gris en attendant de trouver un modèle conforme. Un autre détail apparait sur cette photo, ce sont les bavettes arrière. Je les ai trouvé sur une bourse d'échange dans les Deux-Sèvres auprès d'un vendeur hollandais, installé dans la région depuis plusieurs années, dans leur emballage d'origine destinées aux utilitaire de la marque aux chevrons. Je n'ai pas résisté, je suis reparti avec. Elles s'accordent, selon moi, très bien avec cette fourgonnette...
Cette restauration a durée 2ans et demi. Elle m'a demandé de très nombreux travaux; j'ai dû solliciter de nombreuses personnes pour remettre cette AZU sur la route, que ce soit pour la mécanique, la soudure, la peinture, mais c'est sans aucun doute une des clés pour ce type de projet: être bien épaulé, sans compter les dizaines de bourses d'échanges arpentées pour retrouver des pièces manquantes... Je ne suis ni mécanicien, ni carrossier mais juste amateur et collectionneur de voitures anciennes. Cette 2CV viendra tenir compagnie à ma Dauphine de 57, la Traction de 55, la 125 Motoconfort de 52, le Pick-up 504 de 79, le solex 1010 de 57..tout ce petit monde acheté "a restaurer!" et aujourd'hui en état "collection"
Un grand merci ce blog pour toutes les infos qu'il regroupe et ses Docs de Doc très utiles.
Thierry